Dans un contexte d’expansion du numérique à toutes les sphères de la société, force est de constater que les talents féminins sont encore trop peu nombreux à se tourner vers les filières et les métiers du numérique en France. Pourtant quelques signaux faibles apparaissent.
Les jeunes filles se détournent très tôt des filières du numérique
Contrairement aux idées reçues, les filles ne se désintéressent pas des filières scientifiques puisqu’elles représentaient 56,9% des effectifs ayant choisi “la triplette” mathématiques, physique-chimie, SVT en Première générale en 20191. Néanmoins, elles ne représentent plus que 36% des effectifs ayant choisi la “doublette” mathématiques et physique-chimie en Terminale l’année suivante. Ainsi, le problème ne réside a priori pas en un désintérêt des filles pour les filières scientifiques, mais bien en une difficulté à choisir en Terminale des spécialités considérées comme techniques et trop restrictives pour leurs choix d’orientation. Pour preuve, elles ne sont plus que 12% en Terminale en 2020 sur la “doublette” mathématiques et Sciences de l’Ingénieur (SI).
Une affirmation qui se vérifie en Première Générale où 2,9% seulement des filles ont choisi la spécialisation NSI (Numérique et sciences informatiques) en 2020, un chiffre en très légère augmentation par rapport à l’année précédente (2,6% en 2019). Ce déficit se retrouve et s’aggrave en Terminale, puisque près des deux tiers des filles en spécialités NSI l’abandonnent entre la Première et la Terminale (0,9% des filles en Terminale générale étaient en spécialité NSI en 2020)2
Ce qui se confirme dans leurs choix d’études supérieures
Naturellement, ce déficit se répercute ensuite dans les choix d’orientation post-bac des filles. Si les femmes représentent 55% des effectifs de l’enseignement supérieur, elles ne représentent plus que 28,1% des élèves inscrites en école d’ingénieur à la rentrée 2019.3
A ce titre, la réticence des filles à se tourner vers les filières numériques s’applique à l’ensemble des Établissements Supérieurs sous tutelle du ministère de l’Enseignement Supérieur (MESRI). En effet, la part des filles parmi les étudiants en “Informatique” et “mathématiques et informatique” dans les établissements de formation supérieure sous tutelle du MESRI n’a pas dépassé le seuil des 16% depuis 15 ans4 malgré une courbe nettement ascendante de leur nombre relatif depuis 2016.
Cette tendance est d’autant plus préoccupante que la France réalise une performance médiocre au niveau européen : 23e pays européen en termes de proportion de femmes parmi les élèves diplômés dans les TIC (15,5% en 2018), au-dessous de la moyenne de l’Union Européenne (18,2%)5.
Et impacte finalement le marché du travail
Les difficultés rencontrées lors du parcours scolaire et de l’enseignement supérieur aboutissent logiquement à une sous-représentation des femmes dans les métiers du numérique, où elles représentent moins d’un quart des effectifs (23%).
Quelques signaux faibles semblent toutefois laisser présager un changement récent : Les femmes investissent les filières d’avenir. Ainsi, elles sont proportionnellement plus nombreuses dans les métiers numériques émergents (35 % des effectifs dans métier du numérique dont les effectifs ont au moins doublé entre 2009 et 2017, tels que UI/UX designer ou data scientist) que dans les métiers numériques déclinant (11% des effectifs des métiers dont les effectifs sont en baisse6).
Dans un contexte où 232 000 emplois seront créés entre 2017 et 20277, dans les ESN (Entreprises de Service Numérique) et ITC (Information, Technologie et Communication), (qui représentent 41% des emplois dans le numérique), la pénurie de compétences féminines demeure toutefois problématique. En effet, il faudrait 25 ans8, à taux constant d’élèves issues de formation d’ingénieur, pour atteindre la parité (dans les nouveaux postes uniquement).
Dans un monde où le numérique investit tous les secteurs d’activité, l’implication des femmes est essentielle pour accompagner les évolutions profondes que connaîtront les entreprises et la société en général, au cours des prochaines décennies. Le “Numérique”, transforme l’image de l’”Informatique” des années 80 et ouvre de nouvelles perspectives de carrières.
Attirer les compétences féminines dans ces filières, c’est leur démontrer que de nouveaux choix s’offrent à elles, plus innovants, plus respectueux de la diversité et plus impliquants dans les mutations culturelles et sociétales à venir.
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Sources :
1: Ministère de l’Education Nationale, de la Jeunesse et des Sports – Choix de trois spécialités en première générale à la rentrée 2019 : 15 combinaisons pour 80 % des élèves
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2 : Ministère de l’Education Nationale, de la Jeunesse et des Sports – À la rentrée 2020, les élèves de terminale précisent leur choix de parcours
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3 : Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation – Les effectifs inscrits en cycle ingénieur en 2019-2020
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4 : Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (Open data) – Synthèse des effectifs d’étudiants inscrits dans les établissements et formations de l’enseignement supérieur
5 : Eurostat (base de données) – Étudiants de l’enseignement supérieur par niveau d’étude, orientation du programme, sexe et domaine d’étude
6 : INSEE – Data scientists, community managers… et informaticiens : quels sont les métiers du numérique ?
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7 : OPIIEC – Les emplois, compétences et formations au sein des ESN et des sociétés ICT) en France
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8 : Calcul de Femmes@Numérique sur la base des chiffres de l’enquête “Insertion 2020” de la CGE
Un peu plus sur la place des femmes dans les filières et métiers du numérique:
SYNTEC – OPIEC Etude 2016 égalité entre les femmes et les hommes:
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Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation – Parcoursup 2019 : les propositions d’admission dans le supérieur
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ONISEP – Les métiers du numérique
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Syntec Numérique – Evolution des emplois du Numérique dans les ESN et les IITC
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Baromètre du Women’s Forum – 2020
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Isabelle Collet: Les oubliées du numérique
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Ministère de l’Education Nationale, de la Jeunesse et des Sports – Les Etats Généraux du Numérique
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